Le SCI en cosmétique : qu’en pense-t-on ?

La cosmétique naturelle, végétale et écologique n’a jamais fait autant d’adeptes ! Les produits solides se démocratisent, les gens décryptent davantage les étiquettes pour s’assurer que la composition est clean, l’impact écologique est devenu un vrai critère de choix… Et justement, depuis quelques temps, un nouvel ingrédient commence à être pointé du doigt : le SCI, ou Sodium Cocoyl Isethionate, tensioactif très utilisé dans la fabrication des shampoings solides. Alors, mauvais ou pas ? On fait le point avec vous.

C’est quoi, un tensioactif ?

Si on veut comprendre pourquoi les marques utilisent le SCI en cosmétique, il faut d’abord faire un petit point cosmétologie : un tensioactif, c’est un petit composé qui permet de “modifier la tension superficielle entre deux surfaces”. Dit autrement, il permet le mélange de deux phases qui, à la base, ne se mélangent pas : l’eau et le gras.
Comment ? Chaque petite molécule de tensioactif est amphiphile : un bout a une affinité avec l’eau, l’autre a une affinité avec les corps gras. Ça lui permet de faire le lien entre les deux !

Ces petites molécules peuvent avoir plusieurs actions, dont l’action détergente, intéressante pour faire mousser un savon ou un shampoing : la partie qui aime le gras s’accroche au sébum, toutes les impuretés se mélangent, et hop tout s’élimine en rinçant. Un nettoyant facile !
Les tensioactifs peuvent aussi avoir un effet moussant (ça fait de la mousse), mouillant (ça s’étale bien), émulsionnant (ça garde les phases du produit bien mélangées), conditionnant (ça évite les frisottis des cheveux), humectant (ça maintient la teneur en eau), etc.

Et ensuite, il en existe 4 grandes familles : cationiques, anioniques, amphotères, non ioniques. Ce sont les tensioactifs anioniques les moins chers, les plus détergents, les plus moussants et les plus faciles à rincer. Pas étonnant donc qu’on les choisisse pour les shampoings… Et le Sodium Cocoyl Isethionate en fait partie !

La controverse du SCI en cosmétique : quel est le problème ?

Pour comprendre pourquoi le SCI en cosmétique est controversé, il faut savoir comment il est fabriqué !

Comme son nom l’indique, le Sodium Cocoyl Isethionate est fabriqué à base de coco, mais par un procédé assez lourd, l’éthoxylation. Cette réaction chimique fait intervenir de l’acide chlorhydrique et du sodium isethionate, lui-même obtenu par une autre réaction chimique à base de sodium bisulfite et d’oxyde d’éthylène.

Et c’est cet oxyde d’éthylène qui pose problème :

• Problème numéro 1 : il peut être nocif lorsqu’il est déversé dans la nature… Il faut donc s’assurer que le fournisseur est fiable et qu’il ne le balance pas dans la rivière d’à côté. Le composé fini est biodégradable, ce sont les composés éthoxylés qui le sont beaucoup moins.
• Problème numéro 2 : il est dangereux pour les personnes qui le manipulent (inflammable, cancérigène, génotoxique, tout un panel de trucs pas sympas). La bonne nouvelle, c’est qu’il n’en reste (normalement) aucune trace dans le produit fini. La mauvaise, c’est qu’il est difficile de s’assurer que les fabricants sont bien protégés (nb : c’est aussi le cas pour la soude pour la fabrication des savons, dans une moindre mesure).
• Problème numéro 3 : sa fabrication exige des températures de 150° sous des pressions extrêmes, ce qui demande beauuucoup d’énergie.

Et pour nos cheveux ?

On l’a dit, le SCI en cosmétique mousse bien et lave bien. Mais est-ce qu’il fait du bien à notre cuir chevelu ?
Ça dépend : il nettoie de façon plus douce que ses cousins les sulfates, mais le Sodium Cocoyl Isethionate peut être desséchant et irritant (dit autrement, il est bien détergent, mais un peu trop). Si vous avez des démangeaisons, des pellicules ou les cheveux qui regraissent encore plus vite, ou un nouveau combo racines grasses / pointes sèches ne cherchez plus : le SCI ne vous convient pas. Vous pouvez ajouter un peu de vinaigre dans votre eau de rinçage pour cheveux (véritable soin apaisant et secret des cheveux ultra-doux et brillants), ou changer de shampooing pour votre bien-être capillaire !

Doit-on bannir le SCI en cosmétique ?

Ma devise : réfléchir avant de bannir (je viens de l’inventer, mais c’est vrai).

Comme beaucoup de choses dans la vie, le Sodium Cocoyl Isethionate n’est pas parfait… Mais il est quand même moins pire que d’autres trucs ! Le SCI en cosmétique fait partie des tensioactifs qui ont le moins d’impact (car il est biodégradable rapidement, et plus clean qu’un sulfate), il n’est pas dérivé de l’huile de palme et n’a pas besoin d’être boosté par un autre tensioactif associé.

Et on le rappelle : il est aussi nettement moins polluant que le plastique. Mieux vaut un shampoing solide avec SCI qu’un shampoing liquide dans une bouteille plastique qu’on jette. On vous laisse lire l’article de Blutopia qui a interrogé Umaï et Lamazuna sur le sujet !

Il n’y a pas de solution miracle : à vous de prendre vos décisions en fonction de vos critères et de vos valeurs (c’est un peu le même questionnement qu’entre un pull en laine seconde-main pas végane ou un pull synthétique polluant… pas de réponse toute faite).

Un shampoing naturel sans SCI, ça existe ?

Oui ! Il y a des alternatives au SCI en cosmétique.

Certaines marques proposent des shampoings avec des tensioactifs différents (avec ou sans huiles essentielles), plus doux et plus clean, pour toute la famille :

• Les shampoings Endro sont faits à base de Sodium Cocoyl Glutamate : ce tensioactif est moins moussant, mais plus doux et 100% naturel. Il est difficile à intégrer dans un shampoing solide, mais Endro l’a fait, et on aime beaucoup le résultat !
• Les shampoings Biotanie intègrent des tensioactifs dérivés du sucre, les glucosides (coco-glucoside, decylglucoside) : des tensioactifs tout doux aussi, mais qui ne peuvent être utilisés que dans des formules de shampoings liquides. Il faut donc une bouteille (en aluminium, chez Biotanie) mais l’impact environnemental est moindre si vous ramenez votre bouteille en magasin !
• Les shampoings Cut By Fred intègrent les deux (comme ça, pas de jaloux), mais on attend encore un système de consigne ou de recharge pour limiter les déchets…

Vous pouvez aussi opter pour un shampoing-savon, formulé selon le principe de la saponification. L’inconvénient, c’est que leur pH est basique (compris entre 9 et 11), alors que notre cuir chevelu a un pH autour de 5,5, plus acide. Un savon aura donc tendance à ouvrir les écailles des cheveux et les fragiliser. de plus, on a souvent une sensation “poisseux mal rincé” après s’être laver les cheveux avec ce type de shampoing.

Pour résumer, il est difficile d’avoir une solution parfaite… La première chose à faire est peut-être de repenser la façon (et surtout la fréquence) à laquelle on se lave les cheveux : avec moins de lavage, notre cuir chevelu s’en porte mieux… Et la planète aussi !